Les cosses
Gaël Peltier
30 octobre — 22 novembre 2008
Un climat d’étrange incertitude nous parcourt, ce que l’on voit à travers les œuvres de Gaël Peltier, nous regarde. Il est impossible de rester à la surface de l’iconographie soigneusement élaborée par l’artiste sans être happé par un certain nombre d’indices. Les photographies, les objets présentés semblent s’être échappés d’une situation obscure dont ils auraient gardés la marque. Indéniablement il se passe quelque chose qui relève du « fait divers » célèbre ou plus banal, issu de l’Histoire ou des histoires, illusion de la réalité, prégnance de la fiction.
Dans l’œuvre de Gaël Peltier tout se passe en définitive comme si nous étions appelés à traverser ses cadres pour atteindre un hors champ. Le travail ne se voit, cède à notre perception, que par un réel effort d’investigation. Nous sommes les témoins presque involontaires d’histoires qui nous dépassent à l’instar des personnages de Raymond Chandler ou de Dashiell Hammet. Philip Marlowe et Sam Spade sont aux premières loges de la cruauté humaine, ils trempent dans des affaires pas claires et comme eux, nous y sommes ici confrontés. Là ou les deux détectives teintent leur idéalisme de pessimisme et de cynisme, Gaël Peltier nous laisse à nos propres convictions.
Il n’y a donc là, aucune morale à attendre, aucune chute à laquelle se rattacher. Les œuvres semblent suspendues, insaisissables, elles ne dénoncent ni énoncent quoi que ce soit, elle serait plutôt un principe actif agissant malicieusement sur le spectateur. Épouser l’absence si soigneusement créée (par exemple, une veste chargée de signifiants à habiter), permet de nous fondre dans cette « hallucinante ressemblance du réel à lui-même »1. « Mais là il faut pousser à ses limites la logique de « podisation » (pod=cosse en anglais), se déguiser ne suffit plus, il faut disparaître. »2. C’est ainsi que l’œuvre de Gaël Peltier nous voit en regardant notre plus totale transparence.
Martial Déflacieux
1 Jean Baudrillard dans Simulacres et simulation aux éditions Galilée
2 Jean-Baptiste Thoret, article « Energie, action, violence » in « why not ? » aux édition Rouge Profond