Programme vidéo
Hamid Maghraoui
20 septembre 2008
PPDA est une manière radicale de re-monter le JT de 20 heures, grand-messe cathodique suivie par des millions de téléspectateurs au même moment. Ici, toute parole a disparu, ne sont conservées que les seules inspirations, les prises d’air qui permettent de parler.
Plus aucun discours, plus rien de l’ordre de la propagande, plus d’information, mais des figures haletantes, une perte de souffle ou un essoufflement, parfois proche du râle érotique…
Montage tiré des journaux télévisés où seules les respirations des présentateurs sont prélevées et répertoriées : mises bout à bout, les respirations s’enchaînent de manière à imiter le rythme des rotatives d’imprimerie. Le schéma habituel de la communication par l’information télévisuelle est mis à mal par l’artiste, voire nié, au profit de l’invention d’une nouvelle réalité. Où la mécanique de la machine suscitée par le montage (défilement en boucle des respirations sélectionnées) renvoie sans concession à la mécanisation de l’individu.
Un texte défile sur fonds noir, pareil à celui du prompteur utilisé par les journalistes de l’information : le texte -celui de reportages retenus au hasard de l’information- défile à l’envers, tel qu’on pourrait le voir si l’on se plaçait du côté du journaliste. De l’image ce dernier, l’artiste n’a maintenu visibles à l’écran que les yeux, dont la légère oscillation suppose qu’ils sont en train de lire ce même prompteur. A rebours de ses vidéos où l’image télévisuelle est détournée au profit de l’invention ou d’une nouvelle réalité, Hamid Maghraoui décrypte le processus de diffusion du journal télévisé, dont sont exclus les effets ostentatoires ou dramatiques. Il montre, pour reprendre le mot de Godard, que « la télévision diffuse mais ne produit pas » et confronte le spectateur à l’illusion de l’info en direct : avant de nous être transmise, l’information est écrite, pensée, voire censurée.
Retransmission d’un match de football à la télévision. Le terrain occupe la totalité de l’écran : une moitié de l’image est cryptée, l’autre pas. La ligne de séparation centrale sert de limite au cryptage. C’est la progression du ballon d’une partie à l’autre de l’écran qui permet ou non d’entendre et de suivre l’action qui se déroule sous les yeux du spectateur. Le réel du direct est remis en cause par le procédé qui livre à notre perception une réalité tronquée.
École Supérieure d’Art de Clermont Communauté